Tranquil’

Ça y est nous quittons Mindelo direction Santa Luzia ! Mindelo c’était sympa mais le vent fini par te poncer le cerveau (dixit Maud d’un bateau copain). Enfin la suite nous montrera qu’à Mindelo on était pas mal abrité ! Première navigation pour Charlie notre équipier Australien, dans le chenal entre les iles il y a 25 nœuds établis et nous devons remonter au vent avant la bascule de la marée sinon on ne pourra pas passer avec le courant, un peu tendu ce début de navigation. Avec un coup de moteur à la fin pour aider on sort du chenal entre Sao Vicente et Santo Antao juste à temps, ouf ! Le vent baisse un peu au nord de l’ile et nous pêchons notre plus gros poisson, un thon albacore de 8kg ! Ensuite on passe dans le chenal entre Sao Vicente et Santa Luzia et là le vent remonte, enfin le mouillage au sud de l’ile, 35 noeuds avec des raffales à 40 ! Aaahh y en a marre de ce vent ! Bon en attendant avec le thon nous avons de quoi nous occuper, sushis, saucisson, poisson séché, poisson gravlax, steak … Santa Luzia est une ile déserte, il y a juste un campement de pêcheur, on avait prévu d’y passer 2 ou 3 jours, d’aller à terre se balader, de plonger … mais là avec le vent on n’arrive même pas à tenir debout sur le pont du bateau alors on lève l’ancre et on va voir ailleurs si le vent souffle moins. La suite nous montrera qu’il peut y avoir encore plus de vent, en passant à coté de l’ilot Branco, la mer se met à fumer et le vent s’établit à 45-48 nœuds, vraiment furieux! Heureusement, j’avais anticipé et réduit le peu de génois qu’on avait sorti.  Le reste de la navigation est soutenue avec de nouveau 30 nœuds au près dans le chenal entre Ilheu Raso et Sao Nicolau, et soudain plus rien ! zéro ! on affale les voiles, on allume le moteur pour rejoindre le mouillage de Tarrafal de Sao Nicolau, génial le calme à l’abri de la montagne ! A peine mouillé nous affalons la grand voile qui est de nouveau déchirée ! Je recouds vite fait car je n’arrive pas à bien me caler pour remettre une pièce, on verra ça à Praia.

Tarrafal de Sao Nicolau est un village de pêcheur et le seul port de l’ile. Nous sommes accueillis sur la plage par les enfants qui veulent tous garder notre annexe contre quelques pièces, on choisi Eddy qui sera notre gardien pour le séjour. Ici pas de touristes, nous sommes pour l’instant les seuls. Première virée dans l’ile vers le village de Cachaço, point d’entrée dans le parc naturel du Monte Gordo. Nous repérons un endroit où planter les tentes pour notre prochaine rando. La vallée de Ribeira Brava est impressionnante vue d’ici et nous empruntons l’ancienne route pavée pour descendre à la ville. Sur les hauteurs les terrasses sont abandonnées sur celles du bas quelques cultures de canne à sucre. En passant à coté d’une ferme nous sentons l’odeur caractéristique du jus de canne fermenté, c’est une trapiche, un moulin à canne qui sert à fabriquer le grog. Ribeira Brava est la « grande » ville de l’ile, on reconnait bien le style colonial portugais, quelques beaux bâtiments, mais aujourd’hui c’est dimanche il n’y a pas un chat dans les rues. Sao Nicolau fut une ile fertile, mais plusieurs sécheresses et une invasion de sauterelles ont eu raison de cet équilibre fragile, il subsiste par endroit des zones vertes avec des légumes, bananes, papayes, canne à sucre.

La plage de Baixo de Rocha est la plus belle plage de l’ile, elle est à 8km au sud de Tarrafal, nous nous y rendons une première fois à pied par une piste. Le paysage est lunaire. Les nuages sur les hauteurs et le fort vent font que par endroit nous recevons des gouttes d’eau. Au bout de la piste, la plage de sable blanc avec le rocher dans l’eau, magnifique, entourée par des falaises d’orgues basaltiques, des grottes creusées dans le tuf et une énorme dune. L’endroit est désert, nous profitons de l’eau claire pour faire de la plongée. Tout le monde a envie de revenir ici avec le bateau pour profiter plus longtemps du lieu.

Retour au bateau pour préparer notre rando dans le parc naturel du Monte Gordo pour rallier Praia Branca depuis Cachaço. En milieu d’après midi nous prenons un collectivo pour le village de Cachaço. La montagne est dans les nuages, il fait frais et humide, arrivés au lieu de campement qu’on avait repéré, les eucalyptus sont ruisselants, en fait c’est dépaysant pour nous qui n’avons pas vu la pluie depuis 5 mois. On installe nos tentes sur une aire à coté de la maison forestière du parc qui semble abandonnée, c’est tout plat, parfait. Malgré les interdictions nous allumons un feu pour faire griller nos saucisses, il faudra toute la science du feu de Charlie, Australien et de Siméon, dit Samboun et ancien scout pour faire flamber le bois. Le lendemain c’est le même temps humide, nous montons en direction du sommet, le chemin est bordé par endroit de terrasses avec des caféiers, il y a pas mal de monde qui travaille pour nettoyer les sous bois et préparer la terre. Charlie part faire le sommet seul, nous continuons l’itinéraire principal. Sur un versant derrière le sommet, la montagne ruisselle de partout, des agaves bien vertes poussent en abondance, incroyable. Nous passons un col et commençons à redescendre dans une vallée, changement d’ambiance nous retrouvons les arbustes rabougris et les herbes sèches. Après la pause déjeuner nous arrivons au col qui permet de descendre dans la vallée de Ribeira da Prata, c’est une partie de l’ile très montagneuse et enclavée, nous traversons le village de Cruzinha, ici il n’y a pas de voiture, tout se fait à dos d’âne. Un dernier col et enfin la descente sur le village de Praia Branca, encore des terrasses sur toutes les pentes de la vallée on se croirait au Pérou. Praia Branca, les rues sont quasi désertes, un gars assis au coin d’une rue nous indique une épicerie ouverte avec des bières fraiches. Le gars parle anglais, il a parcouru le monde et maintenant il est assis là toute la journée, il discute avec les passants, il nous explique qu’ici presque personne n’a de travail, l’argent arrive de l’extérieur par les quelques 700 000 Cap-Verdiens vivants à l’étranger. Drôle de pays où plus de la moitié de la population vit en dehors du territoire.

Voilà une bonne semaine qu’on est au mouillage à Tarrafal, nous levons l’ancre pour une courte navigation vers la fameuse plage de Baixo de Rocha. Du vent recharge nos batteries mais ne nous empêche pas de profiter de la plage. En fin d’après midi deux barques de pêcheurs viennent dans la baie, ils tendent un filet et le referment en le tirant depuis la plage. Après avoir observé leur manœuvre, nous nous approchons, aussitôt le chef des pêcheurs nous fait signe de venir, avec Siméon je me retrouve à haler le filet, puis à le replier et enfin à remonter les barques sur la plage. Nous découvrons les prises avec eux, des petites bonites, des sars, une rascasse et d’autres poissons dont les pêcheurs nous ont donné le nom local des garoupas, des kup-kups (rascasse volante), des bidious (poissons perroquets). Aussitôt la pêche est distribuée entre les hommes, ils nous donnent la rascasse, délicieux par ailleurs, et nous leur achetons un gros sac d’autres poissons pour 10€. Flich est le meneur du groupe, il nous explique qu’ils vont dormir sur la plage et repartir dans la nuit pour pêcher et que le lendemain, dimanche, ils reviennent sur la plage pour faire griller du poisson, il nous invite donc à venir passer la journée avec eux, ok de toutes façons nous sommes sur place. Dimanche midi, nous sentons l’odeur des grillades depuis le bateau et Flich vient à la nage nous chercher. C’est marrant mais que font les pêcheurs le weekend … ils organisent une partie de pêche entre amis ! Certains pêchent à la ligne, d’autres au harpon des poissons et du poulpe. Ils cuisinent une grosse marmite de riz et une autre de légumes, du poisson grillé et du grog! L’ambiance est vraiment sympa. Flich me propose de m’initier à la chasse au harpon. Je prends mon harpon qui n’a jamais servi (à part Eric qui l’a utilisé à Madère) et c’est parti, pas si simple sous l’eau de se stabiliser, de viser, le tout en apnée, je touche un poisson mais il arrive à se dégager, pas grave Flich en ramène 6. Pour le retour à Tarrafal, il vient avec nous sur le bateau, il est content de prendre la barre.

Un catamaran arrive au mouillage, il y a un enfant à bord, Siméon et Loïza sautent immédiatement dans l’annexe et montent à leur bord, depuis le temps qu’ils n’ont pas rencontré d’enfants, ils sont trop content d’avoir un copain de jeux. Michel, Marie, Timothée et leur équipier Hugo nous invitent pour la soirée à leur bord. Rencontre très sympa qui nous fera prolonger notre escale à Sao Nicolau.

Nous faisons donc une dernière virée dans la partie est de l’ile. Le village de Juncalinho est presque au bout de la route ensuite c’est la montagne qu’il fait passer en 4×4 ou à pied. A Juncalinho, il n’y a pas grand chose, une épicerie, une église, mais en descendant sur la cote il y a un site de piscines naturelles. L’endroit est très joli et agréable, certains bassins sont assez profonds pour nager et l’eau est chaude! Retour à Tarrafal, demain c’est le départ pour un autre Tarrafal sur l’ile de Santiago.

Charlie a hâte d’y aller, c’est sa première « grande » navigation, environ 17h et surtout sa première nuit en mer. Le vent nous pousse, la mer est désordonnée mais les conditions sont assez bonnes, au petit matin nous entrons dans la baie de Tarrafal à l’abri du vent. Je suis à la table à carte quand Aurélie m’appelle, une baleine ! une baleine ! à 50m du bateau, on voit son dos plusieurs fois et sa nageoire caudale ! Elle a plongé. Magnifique, avec la falaise en arrière plan, mais pas le temps de prendre des photos. Un bel accueil en tout cas, ah c’est beau Tarrafal !

 

Matelotage

Bonjour,

Au cours du voyage j’ai pu perfectionner mon travail de matelotage. Vous pouvez voir mon travail sur la page matelotage du blog : Matelotage et si vous le souhaitez passer commande par mail. Les livraisons seront possibles à partir du mois d’aout.

A bientôt

Siméon

Aride Cabo Verde

Nous voici donc de nouveau tout les quatre à bord en ce 22 mars. Petite visite de Mindelo, on prends nos marques, on cherche où changer des euros en escudos, où recharger le forfait internet, où faire les courses, y-a-t-il des choses à visiter ?? Pas grand chose à visiter au niveau patrimoine culturel, mais la ville est assez plaisante à arpenter, petites rues en quadrillage pavées, maisons colorées, marché… On prends l’ambiance de la ville et on fait face aux sollicitations diverses et variées des locaux qui nous proposent leurs services, veulent nous vendre des choses, nous proposer des guides etc… c’est rapidement assez oppressant. Nous passons notre temps entre le bateau, la ville et le bar flottant de la marina, le fameux flotting bar où on profites des derniers jours avec les copains qui partent bientôt pour traverser, Julie et Patrick qui vont aux Antilles avec leur fils Tristan et Noé et Alice comme équipiers qu’on avait rencontrés à Dakar ; Et Robin et Noé, nos équipiers qui partent pour le brésil sur un super catamaran.

Nous serons immobilisés trois quatre jours au bateau, avec Manu nous sommes malades à tour de rôle… En même temps, ça ne nous était pas arrivé depuis notre départ de France ! Pour nous remettre tranquillement, on tente une petite sortie à la plage de Mindelo, réputée pour ses eaux turquoises, ce n’est pas un mensonge, mais le vent omniprésent et entêtant ici gâche les plaisirs de la baignade et de la rando… Il est parfois difficile d’apprécier le Cap Vert à sa juste valeur avec ce facteur perturbant. (Le vent souffle en permanence entre 20 et 30 nœuds, En gros 35 et 55km/h) Les enfants font quand même péter le maillot, nous on reste en polaire (et oui, quand même!).

La forme étant revenue, on tente une sortie à la journée de l’autre côté de l’île de Sao Vicente au village de Calhau, entouré de trois petits cratères, on voudrait randonner sur deux d’entre eux qui sont côte à côte. On prends donc un collectivos sur la place du marché, et c’est parti pour une petite trentaine de km. Les paysages sont vraiment arides, pierreux et lunaires, certains jardins font des tâches vertes dans le paysage dans des zones bénéficiant d’irrigation, le tout divisé en vallées bordées de montagnes abruptes et lunaires. Arrivés à Calhau, petit village de pêcheur, nous ne verrons pas âme qui vive… Les rues sont désertes, l’ambiance est très étrange, et c’est apparemment comme ça tout le temps après en avoir parlé avec d’autres personnes ayant fait aussi le déplacement…. Très bizarre le village fantôme. Pourtant il est habité, nous verrons plus tard des embarcations de pêcheurs quitter la côte. Nous partons faire la randonnée autour et sur les deux volcans, on passe deux heures dans la désolation de Smaug, c’est très plaisant d’être seuls dans ces paysages sauvages après tous ces jours dans la foule et les sollicitations à Mindelo. C’est toujours excitant d’explorer des volcans, et impressionnant, on observe la force des éruptions passées. On rentre par la grande plage de sable jaune, apporté par les vents depuis le désert, toujours aussi ventée et toujours aussi seuls, le vent est si fort que le sable fouette les zones nues du corps, c’est carrément douloureux, ce sera souvent le cas, il est compliqué aussi d’apprécier les plaisirs de la plage, pas évident le Cap Vert !

Tout le monde nous parle de l’île voisine de Sao Antao, réputée pour ses randonnées et ses hauteurs vertes… Après avoir longtemps tergiversé sur le fait d’y aller avec Totoro ou pas, on se décide pour le ferry, les mouillages étant trop incertains pour laisser le bateau plusieurs jours pendant nos bivouacs. Totoro reste donc au mouillage dans la baie de Mindelo, et nous partons en ferry pour plusieurs jours. On refait les sacs de rando, ça faisait longtemps, on est ravis ! Sao Antao présente un relief beaucoup plus dense, encaissé et haut que Sao Vicente. Au fur et à mesure de la montée en Aluguer, on s’extasie sur la végétation, incroyable depuis le temps qu’on n’avait rien vu de vert, ça commence par des arbustes épineux et on arrive finalement au niveau d’une forêt de pins, on retrouve des odeurs des Alpes, que d’émotions ! On dort à 1400m d’altitude, dans la pinède, juste avant une petite arête, la vue est magnifique, l’endroit très calme, petit feu de camp avec fromage grillé au dessus de la mer de nuage, ça, ça faisait encore plus longtemps ! Le lendemain, on part pour une première ballade facile, sur la route pavée pour le village voisin de Pico Da Cruz, surplombant la mer du haut de la montagne. Là bas, vue sur tout le nord de l’île, et sur les îles de Sao Vicente et Santa Luzia. Le village n’est pas si proche, et c’est un peu dur pour Loïza, surtout qu’il fait très chaud ici, on s’en est rendu compte la veille dès la descente du collectivos, pas de vent du tout en altitude, c’est vraiment un système dans les basses couches. On décide de dormir cette deuxième nuit dans le fond du cratère de Cova, qui est cultivé et habité par plusieurs fermiers, il y a en plus une source à cet endroit. Ce soir, repas au resto 1km ½ au dessus (on y a dégusté la catchupa, plat national à base de haricots secs et de grains de maïs, ils ont plusieurs variétés de tout ça, ainsi que du chevreau rôti, miam!) et demain descente par l’autre côté du cratère dans la vallée Da Paul, réputée être la plus verte de l’île. Il faut dire qu’en effet, on n’est pas déçu, le haut de l’île est très vert, avec des forêts de pins, des cultures en terrasses de partout ainsi que des forêts de feuillus et des prés ! On croise des chèvres attachées au bord des routes, que l’on vient changer de places plusieurs fois par jour et sûrement traire aussi car leurs pis sont pleins, afin de fabriquer le fromage typique de ces îles, le frogo, fromage rond frais. On croise aussi des ânes, qui servent à transporter tout à travers les montagnes, et des vaches, attachées aussi à des piquets. Il n’y a pas ici de parcs à animaux, de clôtures, les animaux sont entravés, mangent autour d’eux et on les change de place régulièrement.

On croise partout des collectivos, des minibus toyota Hiace ou Pick up, qui transportent les locaux ainsi que les touristes ne voulant pas de taxis privés. C’est très bon marché et sympa de rencontrer les gens, c’est amusant pour les enfants (et les grands) quand c’est des picks up, car on est en plein air dans la benne aménagée avec des bancs et on profite bien du paysage. Quasiment aucun local n’a de voiture, tout le monde se déplace comme ça pour de courtes ou longues distances, il y en a beaucoup, il est donc très facile d’en trouver quand on en a besoin. En général au début du parcours chacun à sa place mais en cours de chemin on s’arrête à chaque hameau pour charger des colis ou prendre des gens en plus, prévu pour 16 personnes, il n’est pas rare d’être à plus de 20, tu te retrouve alors avec ta voisine sur les genoux ! Les chauffeurs sont des poèmes à eux tout seuls, la déco de leur véhicule et l’ambiance musicale leur ressemble, pour tous la moumoute synthétique colorée sur le tableau de bord est le must avec le volant sport ! Au niveau musique, c’est très variable selon les goûts du chauffeur : Fat rap américain, musique traditionnelle du Cap Vert, radio, mais plus bizarre aussi, des remixes de Bob Marley avec une réverb de fou et des échos… Et une espèce de biguine bizarre en français avec des rimes exclusivement en el : belle, éternelle etc… et des reprises biguines de grands classiques tel « my heart will go on » de Céline Dion….Un grand moment!

Le lendemain donc, troisième jour sur l’île, on fait la grande descente de la vallée Da Paul jusqu’à la mer… Descente vertigineuse au début sur un chemin pavé dont on se demande même comment il a été construit tant la pente est raide. Cette vallée est une oasis verte, plantée d’un petit cratère en son milieu, le relief est vraiment tourmenté, torturé, avec des pics, des barrancos, des cratères, des arêtes de partout, si bien que tout les trois quatre pas la perspective change et des plis du terrain invisibles avant se découvrent pendant que d’autres disparaissent. Elle est en effet verte du bas en haut, cultivée par des terrasses visibles elles aussi dans des pentes qui paraissent impraticables. Canne à sucre, bananiers et caféiers sont les principales cultures ici, on verra aussi dans le fond de la vallée beaucoup de jardins potagers, et dans des terrasses dans le lit du torrent, du maïs ! C’est en ce moment la haute saison, on ne rencontrera pour autant pas grand nombre de randonneurs comme nous… un groupe d’Allibert trekking nous double dans la descente, puis plus rien les autres jours… C’est génial de se sentir vraiment seuls avec la population locale, le contact avec les gens est bien différent que dans les endroits touristiques, on discute, les gens sont étonnés et contents de voir des enfants ! Une dame nous propose du café en grain de sa production, une autre nous fait du café chez elle et nous vends du grog (à prix d’or, mais bon on n’était pas au courant du cours du grog), l’alcool de canne à sucre distillée local (oui, oui, comme dans monkey island pour ceux qui connaissent, on pense à Guybrush Treepwood et à LeChuck à chaque fois qu’on entend ce mot ou qu’on en boit). On rejoint ensuite la route pavée elle aussi de basalte, très peu de routes goudronnées dans les îles, on imagine le boulot pour paver ces centaines de km de routes…. Les jambes commencent à se faire lourdes, la descente c’est parfois plus dur que la montée, on décide de trouver un endroit pour camper avant la fin de la vallée. Mais pas évident en fond de vallée encaissée…. On trouve un endroit dans le lit du torrent, au pied d’un grand manguier, en contrebas d’une maison construite sur un énorme rocher dans le torrent. On commence à discuter avec la dame de la maison qui nous harangue du haut de sa terrasse, elle parle très bien le Français, ayant quitté le Cap Vert depuis 42 ans. Antonia rentre au pays chaque année plusieurs semaines rendre visite à sa famille, sinon elle vit à Nice ! Sa maman, Maria propose de nous accueillir sur la terrasse au sommet de sa maison qui s’enroule autour du rocher, car elle dit que ce n’est pas bien au fond du torrent, il y a pleins de moustiques ! Après une toilette et une petite lessive dans la lévada, on monte le camp chez Maria. Super rencontre, Antonia est aux petits soins, elle nous offre du pain, des bananes de son jardin (il y a même une terrasse avec des bananiers sur la maison!), de la papaye confite qu’elle à fait le jour même et qui se mange ici traditionnellement avec le frogo… On discute, on échange, elle est sous le charme des enfants eux même sous le charme du chien et du chat de la maison ! Pour le lendemain, on souhaite remonter dormir sur les hauts plateaux et emprunter la route de la corda, apparemment vertigineuse, première route traversant l’île. Elle nous propose d’appeler son cousin qui a un pick up pour qu’il nous emmène, les enfants sont ravis, depuis le temps qu’ils attendent de monter dans un pick up ! Cette nuit là sera hyper chaude, la terrasse en béton restituant en plus toute la chaleur reçue dans la journée ! On se sépare en début de matinée, on descend à la mer, on voudrait visiter le plus vieux moulin à grog (trapiche) de l’archipel avant de regrimper. Après une bonne heure de marche, la vallée débouche direct à la plage, on retrouve le vent et la mer est ici très agitée, des enfants font du body board dans des rouleaux énormes qui s’écrasent sur des gros galets. Manque de bol, les fêtes de Pâques durent ici 5 jours qui sont fériés… Les personnes de la trapiche sont chrétiens, du coup c’est fermé… On achète du grog au supermarché, petit pique nique et on retrouve le cousin d’Antonia pour la Corda ! Là encore, on n’est pas déçu, cette route est incroyable, étroite, elle suit la ligne de crête, avec le vide de chaque côté, bordée d’un petit muret, la vue est magnifique et impressionnante, encore des terrasses, des cratères, des pitons…. On remarche encore une bonne heure et demie depuis le village d’Espongeiros avant de monter le camp à côté d’une ferme abandonnée en haut d’une colline, encore tout seul et encore une super vue ! On traverse pour y arriver plusieurs hameaux desservis seulement par une piste, toujours les bêtes attachées le long du chemin, et à côté d’une petite maison, sur un rocher entre deux arbres, on tue deux cochons, c’est Pâques… spectacle impressionnant auquel les enfants et moi on n’avait pas encore assisté, on dit bonjour en passant mais on ne s’attarde pas trop, on est quand même impressionnés….

Dernier petit feu de camp et dernier camp avant de rentrer à Mindelo retrouver Totoro. On a aussi rendez-vous avec Charlie et Pierre-Yves, deux équipiers potentiels pour notre remontée vers les Açores.

Après une dernière marche tranquille et un dernier pique nique, on prends notre ferry de retour, Totoro nous attends fidèle au poste, 5 jours au mouillage, il n’a pas bougé !

Dimanche, avec les enfants on accompagne Charlie qui est bénévole au refuge pour chien de l’île, SIMABO. Les chiens errants de l’île en mauvaise santé y sont accueillis et gardés en attente d’adoption. L’île est peu peuplée et les adoptions vers l’étranger compliquées… Le refuge est complet… Il y a une centaine de chiens répartis par petits groupes à emmener se promener tous les jours ! On y passe l’après midi, 5 bonnes heures tout de même… À nous tous on aura promené une bonne cinquantaine de chiens, c’est fou ce que les enfants marchent sans râler avec un toutou au bout d’une laisse ! L’association gère aussi une auberge en ville à Mindelo qui sert à financer le refuge et où il y a aussi des chiens (souvent les plus mal en point) et tout un groupe de chats, on y est allé en fin de journée afin de rencontrer tout ce petit monde et surtout Sylvia, la responsable, très contente que des enfants passent du temps avec tous ces animaux. Les enfants sont tellement ravis qu’ils veulent y retourner, Charlie les accompagnera. Ce ne sera pas pour le lendemain, Loïza a un vers de cochon sous le gros orteil qu’elle a attrapé au Sénégal qui s’infecte et qui s’est doublé de deux grosses ampoules qui enserrent l’orteil lors des marches à Sao Antao, cela fait plusieurs jours qu’elle refuse qu’on y touche, mais là, on ne peux plus reculer, direction l’hôpital ! On a donc testé pour vous les urgences de Mindelo, ma foi, rapide, sérieux et gratuit comme en France, on ressort avec un traitement antibio et des pansements à changer deux fois par jour, vive la pharmacie hauturière, on a tout à bord ! Un petit resto pour se remettre de ces émotions de la matinée (le nettoyage des plaies ne s’est pas fait sans pleurs…) On en profites pour goûter la langouste grillée, une première pour nous tous, miam !

Nous sommes déjà mardi et il faut penser à continuer notre route, nous prévoyons de partir le jeudi matin pour Santa Luzia, une île déserte voisine de Sao Vicente puis de pousser ensuite jusqu’à Sao Nicolau pour au moins 10 jours. Pendant que les enfants retournent passer l’après midi avec les chiens du refuge (Loïza avec une chaussure à moi sur son pied blessé), avec Manu nous profitons de leur absence et d’être au ponton à la marina (pour prendre une vraie douche chaude, la première depuis fin décembre et remplir les réservoirs d’eau) pour faire l’inventaire complet de tous les coffres du bateau au niveau nourriture afin de voir où on en est après plus de 6 mois de voyage et ce qu’il faut racheter en prévision de la remontée sur les Açores. En effet, Mindelo est la seule marina de l’archipel, avec une supérette à trois tours de roues de caddy. A praia, le port de pêche est éloigné du centre ville et il y a trois bateau à couple à enjamber, plus quelques murets à escalader pour parvenir au bateau et rien n’est faisable sans taxi. Il faut donc que notre stock de produits secs et bouteilles d’eau soit fait pour le mois prochain, il n’est pas prévu de repasser par Mindelo avant de remonter.

Le soir repas à bord avec Pierre-Yves et Charlie. Ils sont tous les deux partant pour rallier les Açores à bord. Charlie, Australien, qui n’a jamais navigué va nous accompagner lors de nos navigations jusqu’à Santiago pour qu’on puisse voir si on se sent de l’embarquer et si ça lui convient aussi, il sera notre premier équipier non francophone. Pierre-Yves termine son volontariat à SIMABO, se ballade un peu dans l’archipel et nous rejoindra à Praia après le départ des enfants. C’est reparti pour de nouvelles découvertes !

Vers le Cap Vert

On craignait la barre à la sortie du fleuve mais c’est passé crème, comme dirait Siméon ! Début de navigation au moteur par manque de vent et un fort courant nous empêche de progresser normalement, en 48h nous n’avons fait que 100 miles au lieu de 300 miles habituellement ! Heureusement le vent se lève et Totoro peut enfin s’exprimer au prés bon plein, la houle n’est pas encore là, un régal. On croise un cargo étrange qui est stationné au milieu de l’océan, aucune réponse radio, à bord de Totoro l’équipage spécule sur son activité, légale ou illégale, des pirates ? Après enquête il s’agit d’un bateau de prospection de forage sous marin. Les jours suivants le vent forcit, la mer devient moins confortable mais nous avançons bien. Après 5 jours de mer l’ile de Maio est enfin en vue encore quelques heures et nous serons au mouillage à Praia au sud de l’ile de Santiago. Dans la soirée la police maritime vient nous voir pour nous dire d’aller s’amarrer au port de pêche à cause des vols et du vent, bienvenue au Cap Vert ! Dans la nuit après bien des péripéties Aurélie rejoint le bord. Ça y est tout le monde est là.

Le lendemain nous rencontrons Quintino, le pêcheur auquel nous sommes amarré, il fait des petits boulots dans le port et peut nous aider pour récupérer de l’eau, du gaz et d’autres services et en plus il parle français. Il se désole de ne plus voir de voilier à Praia à cause de la mauvaise réputation de la ville et est content de pouvoir nous aider et surveiller notre bateau. On part découvrir la ville l’esprit tranquille. Après les 2 mois au Sénégal, Praia nous semble bien moderne, on retrouve une ambiance plus occidentale, des voitures en bon état, des constructions bien organisées dans le centre ville. Les sons sont aussi différents, on n’entend plus l’appel à la prière du muezzin, ça fait un vide on s’y était habitué. Enfin on découvre des coins sympas, le marché, une cantine qui propose des bons plats locaux, les mamas qui vendent leurs beignets dans la rue …

Les formalités et les pleins d’eau, gaz et produits frais sont fait on part pour le nord ouest de l’ile dans la baie de Tarrafal, Robin, Arnaud, Noé et Siméon vont faire la traversée de l’ile en stop et nous rejoindrons au mouillage. Avec Aurélie et Loïza nous partons à la voile par le sud de l’ile. En cours de route nous apercevons une tortue marine en détresse, elle est empêtrée dans des cordages avec des bidons, elle semble à bout de force et sa compagne nage autour d’elle désemparée. Heureusement il n’y a pas de vent et pas trop de vagues, avec l’annexe Aurélie et Loïza vont la prendre en remorque, ensuite je la hisse sur la plage arrière du bateau, elle pèse au moins 60kg ! Elle est tellement fatiguée qu’elle se laisse faire. Après pas mal de temps à couper tous les cordages, elle est libre et nous la remettons à l’eau, elle plonge directement au fond. Hep hep hep une bonne chose de faite ! L’aventure n’est pas finie pour nous car une fois la pointe sud passée un vent de face de 25 à 30 nœuds se lève, la mer se creuse, Aurélie qui n’est plus amarinée n’est pas à l’aise. Nous n’arrivons pas à gagner au vent, le soleil se couche, le vent est irrégulier, je finis par approcher de la cote et je met le moteur à fond. Pendant 3 heures nous allons remonter péniblement vers le nord. Pour remonter le moral de l’équipage on ouvre un petit pâté de La Ronflette, avec notre bon pain fait à bord c’est un régal, on prends notre mal en patience et vers minuit nous mouillons dans la baie de Tarrafal.

Tarrafal est un petit port de pêcheur, ici le tourisme reste discret et la ville garde son authenticité. Le paysage est superbe avec une grande falaise au nord, une belle plage de sable au fond de la baie et la montagne en arrière plan. C’est aussi un spot de surf, la vague n’est pas facile car courte et raide, mais il y a pas mal de monde dans l’eau dont les enfants du village, Siméon les rejoint avec son surf. Il y a même un jeune local qui donne des cours, Siméon s’y inscrit pour le lendemain. L’équipage retrouve le rythme du mouillage, un bon petit déjeuner avec le pain chaud cuit le matin même, ensuite chacun part pour différentes activités à terre. Avec Robin nous décidons de partir en rando, on a l’idée de faire le sommet qui surplombe la baie mais sur la carte il n’y a pas d’itinéraire de marqué, on part donc à l’instinct dans la forêt d’acacia. Après une lecture de paysage on repère quelque chose qui ressemble à un chemin et qui nous conduira au sommet, la fin de la rando est un peu aérienne avec quelques pas d’escalade et un chemin de crête. Ça fait du bien de retrouver du relief et du rocher. De son coté Siméon va à son cours de surf, le moniteur prête un bodyboard à Loïza et tous les 2 s’éclateront dans les vagues toute l’après midi (au premier et au deuxième sens du terme). Le dernier jour avant de partir pour Mindelo sur l’ile de Santiago, nous allons faire l’approvisionnement au marché municipal, peu de fruits à part des papayes et des bananes mais pas mal de légumes. Dans une épicerie on trouvera du café vert, l’occasion de le torréfier nous même, et aussi du frogo le fromage de chèvre frais local.

Le lendemain la météo annonce 25 nœuds de nord-est, nous serons au prés, ça s’annonce sportif. En passant la pointe nord nous nous faisons bien brasser, mais ensuite les vagues sont moins raides et on avance bien. Pendant la traversée nous apercevrons des jets de cétacés, baleine ou cachalot, et surtout on pêchera une dorade coryphène, ça fait longtemps qu’on n’a rien pêché, Arnaud est tellement heureux de la prise que 15min plus tard le poisson est déjà dans le frigo ! Vers midi nous arrivons à l’est de Sao Vicente et je prends la décision de passer par le canal de Santa Luzia. Après quelques heures de navigation dans le canal on comprends que nous n’arriverons pas à passer, nous n’avons pas pris soin de vérifier les heures de marée et avec le courant nous n’avançons pas. Pas grave nous ferons le tour par le sud de l’ile, cap vers San Pedro, un mouillage juste avant le canal de Santo Antao. Le vent sous l’ile est hyper irrégulier avec des bourrasques qui descendent de la montagne et font fumer l’eau tellement elles sont violentes rendant la navigation à la voile impossible. Nous découvrons la cote sud complétement désertique et aride, c’est sauvage et austère. Enfin nous arrivons dans la baie de San Pedro, au fond un petit village de pêcheur, devant quelques bateaux au mouillage, le vent souffle à 30 nœuds, c’est abrutissant. L’ancre tient bien, on peut cuisiner notre poisson (Robin a aussi pêché une sole à la dandine au mouillage!) et enfin ouvrir notre bouteille de champagne pour la traversée depuis l’Afrique!

Le matin nos voisins de mouillage lèvent l’ancre tôt, nous, nous déjeunons tranquillement, ce n’est qu’au moment de partir que nous réfléchissons à notre mésaventure de la veille dans le canal de Santa Luzia, la marée n’est plus dans le bon sens pour aller vers le nord, on ne passera pas avant la prochaine marée montante ! 3 heures plus tard le moment est venu, on s’attend au pire et on ne sera pas déçus. Je décide de rester le long de la falaise et de remonter au moteur, au milieu du canal les vagues déferlent. On aura droit à des rafales de 47 nœuds avec les vagues de face le bateau est stoppé même avec le moteur à fond, nous progressons très lentement et nous mettrons 3h pour faire les 6 derniers miles ! Ouf, enfin Mindelo. Le lendemain l’annexe est vite gonflée et une partie de l’équipage débarque. Noé et Robin quittent le bord, ça fait toujours un vide, nous avons partagé des bons moments avec eux, pour les enfants c’est aussi un déchirement, c’est intense et dur ces rencontres limitées dans le temps, mais chacun suit sa route. Et souvent les routes se croisent de nouveau, pas plus tard que le soir même au bar de la marina, nous retrouvons à la même table, Patrick et Julie avec leur fils Tristan que nous avions rencontré à Santa Cruz de Ténérife aux Canaries et un autre Noé que nous avions rencontré lui à Dakar. En plus Robin avait lui rencontré ce Noé là en Mauritanie lors de sa descente en camion ! Moment incroyable où une multitudes de chemins se croisent de nouveau ! Nous avons alors l’impression de faire tous partie de la grande famille des voyageurs au long court. Robin et Noé ont trouvé un embarquement sur un catamaran pour le Brésil, on doit porter chance car tous nos équipiers ré-embarquent dans la foulée. Le lendemain c’est au tour d’Arnaud de nous quitter, il faisait presque partie de la famille depuis le temps qu’il est avec nous. Nous nous retrouvons à 4 pour la première fois depuis 3 mois, ça nous change, on apprécie encore plus ces moments en famille. Nous avons pas mal de projets pour les prochains jours, explorer l’ile de Sao Vicente, trouver des équipiers pour la remontée vers les Açores et aussi organiser une expédition sur l’ile voisine de Santo Antao, mais ça sera pour le prochain article.